Sylvaine et Marcelle STEINBOCK
par Jean-Jacques Francfort et Sandrine Alberelli, fils et petite-fille de Marcelle Steinbock
Sylvaine était née à Metz le 9 mars 1926.
La famille Steinbock est arrivée en mai 1940, à Montargis, 49 rue de Châteaurenard, en fait sans doute avant pour des “vacances”. Je me souviens vaguement d’un transport de meubles par chemin de fer. En fait, un tel transport s’organise bien avant un départ ou une fuite, un mois avant l’Armistice, surtout en connaissant le caractère d’Ernest Steinbock.
Les moyens d’existence de cette famille étaient théoriquement nuls et le même Ernest Steinbock avait déclaré le 9 juillet 1941 aux autorités françaises de l’époque qu’il avait laissé tous ses biens à Metz et qu’il était actuellement sans occupation. En fait, ancien maître de Forges et négociant en fers et métaux, il était assez aisé et il avait pu faire des dépôts surtout dans des banques françaises, mais également dans des banques suisses et sarroises, avant-guerre. Lors de son arrestation, le 23 février 1944, avec son épouse, il aurait déposé à Drancy une somme d’argent assez conséquente d’après mes informations, bien entendue spoliée.
Sylvaine a été une élève jolie, travailleuse et toujours joyeuse du Lycée de Montargis, en classe de seconde. Voici quelques extraits d’une lettre de Madame Hermance Steinbock (sa maman) trouvée en mauvais état, mais reconstituée et que je recopie. Cela s’est passé le vendredi 26 juin à 9 h du soir :
“… Très prise, tout le mois de mai et de juin par les compositions, Sylvaine fêtait avec ses patins à roulettes, en compagnie d’une petite voisine, la fin des examens de cette année. Marcelle m’appelle, je remonte, arrivée à la porte de ma cuisine, je vois des hommes en civil et des militaires (Je précise : des hommes de la Gestapo et des gendarmes français du Gouvernement de Vichy). Ils disent : nous venons chercher vos deux filles pour travailler en Allemagne ; vous avez ¼ d’heure pour préparer leurs vêtements et des victuailles pour deux jours. Je supplie : “laissez-moi mes deux filles, nous n’avons jamais fait de mal !” Pouvez-vous imaginer cette scène, ma Sylvaine qui pleurait, moi de même. Leur chef dit : “Si vous ne cessez pas vos pleurs, les parents sont mis de suite en prison”. Sylvaine a été arrêtée, en même temps qu’une petite amie de classe, qui 2 jours avant passait son baccalauréat. Ce jour, 9 sont partis de Montargis, tous presque des réfugiés…”
La sous-préfecture, alertée, bien entendu, n’a pas bougé, même pour faire relâcher les enfants mineurs. Par contre, les voisins ont été très bons et secourables, en particulier monsieur et Madame Corbasson et une madame Chevallier.
Des renseignements m’ont appris que Sylvaine et Marcelle, sa sœur aînée, ont été violées et torturées avant d’être envoyées ultérieurement à Orianenbourg-Sachsenhausen, camp de concentration, un des quartiers généraux des SS.
Sandrine Alberelli, petite-nièce de Sylvaine, nous communique les dernières lignes écrites par une des amies de 3e de Sylvaine (Jacqueline Larousses) le 8 avril 1941 : “…Je n’oublierai jamais, petite Sylvaine, tes boucles brunes, ton air un peu moqueur et surtout ta franchise, jamais ébranlée par aucuns détours. Reste naturelle, gentille et espiègle comme tu l’es et tu laisseras partout où tu passes, un courant de sympathie”.
Sylvaine a été déportée par le convoi 5, en même temps que sa sœur Marcelle.
Témoignage recueilli en 2013
SYLVAINE ET MARCELLE STEINBOCK
Arrêtées le 26 juin 1942 à Montargis (Loiret)
Internées au camp de Beaune-la-Rolande
Déportées à Auschwitz le 28 juin 1942 par le convoi 5
Assassinées en déportation
JEAN-JACQUES FRANCFORT
Fils de Marcelle Steinbock et neveu de Sylvaine Steinbock
SANDRINE ALBERELLI
Petite-fille de Marcelle Steinbock et petite-nièce de Sylvaine Steinbock